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“Parlons, il est temps” de Philippe Aractingi : une œuvre entre rire, exil et mémoire

Fabienne Touma 17 septembre 2024
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Philippe Aractingi dans "Parlons, il est temps" © Théâtre Essaïon

La pièce de théâtre “Parlons, il est temps”, du cinéaste libanais Philippe Aractingi, arrive sur la scène parisienne après avoir été plébiscitée au Liban. Présentée pour la première fois en français au théâtre de l’Essaïon à Paris, elle offre une expérience artistique riche et immersive. Aractingi y explore des thèmes profonds tels que la guerre, l’exil et la quête d’identité, tout en mêlant habilement humour, autodérision et émotion.

Un parcours à la fois personnel et universel à la découverte de sa voix

Connu pour son travail derrière la caméra, Philippe Aractingi choisit de se mettre en scène, prenant le risque de dévoiler son histoire personnelle sans artifice. Cette transition du cinéma au théâtre lui permet d’aborder, avec authenticité et intimité, les moments marquants de son parcours artistique et personnel. Arrivé à un tournant de sa carrière, il prend le temps de réfléchir à son cheminement, notamment à cette quête de la parole et du langage qui a ponctué sa vie.

Son histoire est singulière. Enfant, Philippe évolue entre deux langues : le français, langue de sa mère, et l’arabe, langue de sa nourrice. Lorsque celle-ci disparaît brusquement, le jeune garçon perd l’usage de la parole. C’est à travers la musique, la photographie, puis le cinéma qu’il tente de retrouver sa voix. Parlons, il est temps raconte cette quête de communication à travers différents médiums artistiques, et trouve son aboutissement sur scène, où la parole devient le point central.

Aractingi poursuit cette réflexion sur les langues en faisant le choix audacieux de jouer cette pièce en français. Pour lui, traduire une œuvre initialement écrite en arabe est un véritable défi. Bien qu’ayant grandi dans un environnement francophone, l’adaptation de l’humour, des émotions et des subtilités de la langue représente un enjeu considérable. Il est néanmoins impatient de voir comment le public parisien accueillera cette version francophone, curieux des réactions que suscitera cette adaptation.

Guerre et exil : la réconciliation avec le passé

La pièce aborde également la guerre, notamment celle qui a profondément marqué le Liban, pays d’origine de l’auteur. Philippe Aractingi explore la manière dont il s’est réconcilié avec ce passé, une résonance particulièrement forte pour les personnes ayant vécu l’exil. Il sait que ce qui est personnel devient souvent universel. Le public, qu’il soit libanais ou français, se reconnaît dans cette évocation des blessures laissées par la guerre et l’exil, et la nécessité de se reconstruire après de tels bouleversements.

Il traite ces sujets avec un mélange d’humour et d’autodérision et en toute légèreté, rendant la pièce accessible tout en profondeur. En partageant ses expériences, Philippe Aractingi tisse des liens avec son public, lui permettant de s’interroger sur des questions de langue, d’identité et de culture, commune à tous les exilés.

Une expérience artistique immersive

Mise en scène par Lina Abyad, Parlons, il est temps va au-delà du simple récit personnel. Elle propose une expérience immersive grâce à l’utilisation d’éléments multimédias. Des projections d’images, des extraits de films, et des moments poétiques plongent le spectateur au cœur des souvenirs du cinéaste. Cette approche visuelle et sonore rend l’œuvre universelle.

Philippe Aractingi nous offre alors une œuvre introspective et généreuse, où chacun peut se retrouver. En revisitant son passé avec délicatesse et humour, il invite le public à réfléchir sur son propre parcours, ses propres exils intérieurs. La pièce célèbre ainsi la capacité de l’art à guérir les blessures.

Une œuvre à ne pas manquer

Parlons, il est temps est une pièce incontournable, à découvrir au théâtre de l’Essaïon jusqu’au 29 octobre 2024. C’est un moment de partage et d’émotion, où la petite histoire d’un homme se mêle à la grande, touchant chaque spectateur d’une manière unique.

Billetterie et plus d’infos juste ici

Fabienne Touma

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